Il est vrai que l’ostéoporose touche surtout les femmes âgées. Cependant, il y a une chose que les jeunes femmes ne doivent pas oublier : pour élaborer sa masse osseuse et éviter la maladie plus tard dans la vie, il est nécessaire d’agir dès aujourd’hui. Voici comment.
Evangeline Holtz n’avait que 19 ans lorsque son médecin lui a annoncé qu’elle avait les os d’une personne de 70 ans. «Lorsque j’ai appris cette mauvaise nouvelle, ça m’a vraiment stressée.» Elle prenait des cours de ballet depuis l’âge de 10 ans et suivait un régime afin d’éviter de prendre du poids; elle faisait 1,65 mètre, mais ne pesait alors que 44,5 kilos. Les deux facteurs conjugués ‘ restriction calorique et très grande dépense énergétique ‘ l’ont menée droit à l’ostéopénie, affection se caractérisant par une diminution de la densité osseuse. L’ostéopénie est un précurseur de l’ostéoporose, maladie potentiellement invalidante qui fragilise les os et entraîne des fractures, particulièrement au niveau de la colonne, du poignet et de la hanche.
Evangeline Holtz a donc arrêté la danse et s’est inscrite en littérature anglaise à l’université de la Colombie-Britannique où, dit-elle, «j’utilise mon cerveau plutôt que mon corps». Lorsqu’elle faisait de la danse, elle consommait très peu de produits laitiers. Aujourd’hui, explique-t-elle, «je prend des suppléments de calcium, je mange beaucoup de yogourt et j’avale des tonnes de lait.» Elle fait également des étirements, de la course et de l’haltérophilie. Maintenant âgée de 22 ans, elle pèse 54,5 kilos et sa dernière scintigraphie osseuse indique que son état est stable. Malgré tout, elle ne prend aucun risque : elle évite les sports comme la planche à neige, le patin à glace et à roues alignées, le ski et la planche nautique. «Si je me cassais une jambe, je mettrais trois ou quatre fois plus de temps à guérir qu’une personne normale.»
S’il est donc vrai que l’ostéoporose touche surtout les femmes de plus de 50 ans, cela ne signifie pas que les jeunes femmes, y compris les adolescentes, doivent ignorer le risque. La docteure Angela Cheung, chercheure à l’université Health Network de Toronto, rappelle qu’il fut un temps où la recherche sur l’ostéoporose «portait sur les personnes plus âgées» mais qu’on connaît désormais l’importance de voir à la santé osseuse dès le jeune âge afin de prévenir le risque plus tard dans la vie. «Cela signifie qu’il faut bien manger et rester physiquement active», souligne-t-elle.
«L’os est un tissu vivant», souligne Susan Whiting, professeure de nutrition à l’université de la Saskatchewan. «Il a besoin des mêmes nutriments que les autres tissus, ainsi que de calcium et de vitamine D.» Pour s’assurer que son alimentation est équilibrée, elle conseille de suivre les directives du Guide alimentaire canadien.
Bien que cela semble aller de soi, la revue Canadian Family Physician soulevait, en 2003, une préoccupation majeure : soulignant l’importance de maximiser la masse osseuse tôt dans la vie afin de retarder l’apparition de l’ostéoporose, on faisait remarquer qu’environ 60% des filles âgées de 13 à 17 ans ne consommaient pas les quantités recommandées de lait et autres produits laitiers. Pour avoir une bonne ossature, les adolescents ont besoin de calcium; plus tard, dans la vie, ce minéral est aussi important si l’on veut préserver ses os.
Pour ce qui est de la vitamine D, on a longtemps cru que son principal rôle était de favoriser l’absorption du calcium par l’organisme. Cependant, ce nutriment apparaît présentement comme un joueur de ligue majeure, indépendamment de son lien avec le calcium. Les apports quotidiens recommandés sont présentement en processus de réévaluation par Ostéoporose Canada (voir ci-dessous, les recommandations actuelles); quant à Santé Canada, elle recommande aux personnes de moins de 50 ans de prendre 200 UI tandis que la Société canadienne du cancer conseille des doses de 1000 UI durant l’automne et l’hiver.
Selon Reinhold Vieth, professeur à l’université de Toronto : «Une plus grande consommation de vitamine D semble avoir pour effet de freiner la destruction du tissu osseux et d’améliorer les fonctions musculaires et nerveuses». Comme, au Canada, il est difficile d’obtenir du soleil les quantités de vitamine D dont nous avons besoin, Santé Canada recommande de se tourner vers les aliments enrichis ou les suppléments.
Physiothérapeute et co-auteure de Body Basics for Bones, Darien Lazowski-Fraher, qui vit à London (Ontario), affirme que, pour élaborer leur tissu osseux et le préserver, les femmes doivent faire «des exercices avec heurts faisant appel au poids de leur propre corps. Les adolescentes devraient courir, sauter, sauter à la corde, jouer au volleyball, au basketball ou au tennis. Les adultes devraient faire de la marche rapide, de la course ou du jogging. Quant aux personnes âgées, elles devraient opter pour des exercices présentant de faibles risques de chute.» Il faut savoir aussi que bien que la natation renforce les muscles, elle n’exerce pas cet effet sur les os.
Sa mère souffrant de cette maladie, Janet Gagnier court un risque élevé de faire de l’ostéoporose. Cette femme de 51 ans, qui vit à Halifax, a passé sa première scintigraphie osseuse il y a environ cinq ans; l’examen a révélé qu’elle avait commencé à perdre de la densité osseuse. Sa dernière scintigraphie indique qu’elle est à la limite de l’ostéoporose. Elle prend donc des suppléments de vitamine D et de calcium, et se rend au gym quatre ou cinq fois par semaine. «Je ne voudrais pas me casser la hanche à 70 ans», s’exclame-t-elle.
Il y a vraiment de quoi s’inquiéter compte tenu qu’environ 1,4 million de Canadiens souffrent d’ostéoporose. Entre avril 2005 et avril 2006, la maladie a entraîné une fracture de la hanche chez 28 000 personnes; 20% d’entre elles en sont décédées et la moitié de celles qui ont survécu sont handicapées.
On ne peut dépister soi-même la maladie; par contre, on peut passer une scintigraphie osseuse afin de déterminer sa densité osseuse et son risque de fracture. Votre degré de risque – faible, modéré ou élevé – déterminera si vous devez apporter des changements à votre alimentation et votre mode de vie ou si vous devrez prendre des médicaments d’ordonnance. Un nouveau test qui pourrait être bientôt disponible, rendra le dépistage de l’ostéoporose encore plus accessible: en mars 2007, des chercheurs hollandais rapportaient qu’ils avaient trouvé le moyen d’utiliser un logiciel permettant d’analyser les radiographies dentaires de routine afin d’identifier les femmes à risque.
Entre-temps, il y a tout de même lieu de se réjouir car nous en savons de plus en plus sur les moyens à prendre aux diverses étapes de l’existence pour prévenir l’ostéoporose. Cette connaissance porte d’ailleurs des fruits : au Canada, le nombre de fractures de la hanche a diminué de 13% au cours des cinq dernières années.
Majeurs:
Mineures:
Adolescentes, jusqu’à 18 ans:
Bougez: faites une heure d’exercice par jour
Surveillez vos apports alimentaires: calcium: 1300 mg’; vitamine D: 200 UI*’
Femmes de 19 à 50 ans:
Bougez: faites une heure d’exercice, trois fois par semaine
Surveillez vos apports alimentaires: calcium: 1000 mg’; vitamine D: 400 UI*’
Passez un test de dépistage: à 50 ans, les femmes ayant un facteur de risque majeur ou deux facteurs mineurs (voir ci-dessus) et qui n’ont pas encore passé de scintigraphie osseuse devraient le faire.
Femmes de 50 ans et plus:
Bougez: faites une heure d’exercice, trois fois par semaine
Surveillez vos apports alimentaires: calcium: 1500 mg’; vitamine D: 800 UI*’
Passez un test de dépistage: à 65 ans, toutes les femmes devraient passer une scintigraphie osseuse.
‘ Indications d’Ostéoporose Canada
*Unités internationales