Pourquoi nous remettons à demain et comment y remédier?
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Trace MacKay est une «pro» de la procrastination. Préadolescente, s’étant inscrite à une joute oratoire, elle avait commencé à rédiger son discours… la veille. À la faculté de médecine vétérinaire, elle potassait la nuit avant ses examens. Aujourd’hui âgée de 48 ans, l’Ontarienne, qui travaille comme vétérinaire et comme experte-conseil, remet toujours à plus tard autant sa déclaration de revenus que ses projets professionnels.
«Je ferais n’importe quoi pour ne pas m’y mettre: faire des sudokus sur mon téléphone, engager la conversation avec quelqu’un, avoue-t-elle. Surtout depuis que je travaille de la maison: je vais démarrer une brassée, sortir au jardin pour arroser ou désherber, lire trop longuement le journal le matin… Tout pour retarder le moment de me mettre au travail.»
Trace MacKay a pris des moyens pour vaincre la procrastination, mais comme elle ne lui a jamais attiré d’ennuis graves, elle confie n’avoir jamais été forcée de la combattre vraiment et continue à remettre au lendemain.
Même si vous ne faites pas partie des champions de la procrastination, il vous est sûrement arrivé de repousser à plus tard une corvée pour vous livrer à une activité plus agréable. Dans sa forme la plus inoffensive, la procrastination nous amène à moins soigner notre jardin que nous le voudrions ou à retarder des vacances bien nécessaires. Dans ses formes plus nocives, elle nous empêche d’avoir des conversations importantes avec nos proches ou nous fait négliger des problèmes de santé. Et elle peut affecter notre confiance en soi, notre santé, notre joie de vivre.
Par bonheur, il existe des trucs simples pour dompter la bête et mener enfin la vie dont nous rêvons.
On pense souvent que la procrastination est un problème de gestion du temps. Et donc, on suppose qu’on pourrait la vaincre en dressant plus de listes ou en téléchargeant une application de gestion du temps. Or, cela fonctionne rarement parce que la procrastination relève plutôt de la régulation émotionnelle: nous remettons à plus tard parce que nous sommes programmés pour préférer le plaisir immédiat à la satisfaction ultérieure.
«La procrastination est aussi ancienne que la condition humaine, affirme Tim Pychyl, chef du groupe de recherche sur la procrastination à l’Université Carleton. L’envie d’être heureux maintenant est un besoin fondamental de l’être humain.» Hélas! reporter des tâches nécessaires engendre souvent de la culpabilité et de la honte. Plus nous remettons à demain, plus le cercle vicieux se renforce et plus nous nous sentons malheureux.
Tim Pychyl propose trois trucs pour maîtriser la tendance à procrastiner. Premièrement, distinguer la procrastination d’un report motivé. La procrastination est souvent irrationnelle (remettre à plus tard sa déclaration de revenus, sachant que le stress ne fera qu’augmenter), tandis que reporter peut s’avérer rationnel (terminer un devoir la veille de l’échéance si l’on travaille mieux sous pression). Deuxièmement, prendre conscience qu’en procrastinant, on se dessert. Et troisièmement, apprendre à se pardonner quand on rate son coup.
Chelsea Charles
La prochaine fois que vous aurez envie de remettre une tâche à plus tard, poursuit Tim Pychyl, posez-vous cette question: «Que ferais-je en premier si je m’y attaquais dès maintenant?» Vous êtes chargé d’un projet important au bureau, mais ne savez pas par où commencer? Prenez rendez-vous avec votre patron pour clarifier ses attentes. Vous êtes enfin décidé à réaliser des travaux de rénovation chez vous? Faites une liste de tout ce dont vous aurez besoin. Établir des premiers pas réalistes déplacera votre attention de l’incertitude vers une action peu stressante et facile à réaliser, tout en vous donnant du pouvoir sur la situation. «Notre recherche et l’expérience démontrent très clairement qu’une fois lancés, nous sommes en général capables de continuer, ajoute Tim Pychyl. L’essentiel, c’est de faire le premier pas.»
Le Dr Piers Steel enseigne la dynamique organisationnelle et la gestion des ressources humaines à l’université de Calgary. Il a commencé à étudier la procrastination parce qu’il en souffre lui-même. «Ce ne sont pas des leçons difficiles à retenir, reconnaît-il, mais nous n’avons jamais reçu copie du mode d’emploi de notre cerveau.» Il suggère qu’il peut aussi être utile d’inscrire chaque action dans un cadre temporel: que pouvez-vous faire durant une dizaine de minutes ou avant le repas?
Par exemple, si vous voulez ranger votre sous-sol mais que l’idée vous donne envie de claquer la porte et de fuir à toutes jambes, essayez de diviser la pièce en sections que vous pouvez nettoyer en 30 minutes. Donnez-vous l’objectif d’en faire une par jour et attaquez la première sur-le-champ.
Multipliez vos chances de réussite en vous servant de repères, en prenant des résolutions et en exploitant vos heures productives.
Les repères et résolutions sont censés vous faciliter le plus possible l’exécution d’une tâche ou l’atteinte d’un objectif. Vous avez du mal à vous entraîner le matin? Sortez votre tenue de sport la veille au soir et placez vos chaussures devant la porte.
Pour profiter de vos heures productives, planifiez les tâches qui vous rebutent aux moments de la journée pendant lesquels vous êtes le plus efficace et motivé. Vous voulez vous entraîner pour une course de 10 kilomètres? Choisissez la période durant laquelle vous avez le plus d’énergie. Vous devez préparer un plan d’épargne pour votre famille?
Demandez-vous quand votre partenaire et vous avez l’esprit assez libre pour entamer cette conversation potentiellement stressante.
C’est ce qui a fonctionné pour Trace MacKay, dont la productivité est à son plus haut juste avant le repas de midi. En revanche, elle a appris à ne pas miser sur l’après-midi.
«C’est juste bon pour la sieste, dit-elle en riant. Je me dirais: j’ai tellement de choses à faire que je devrais d’abord dormir un peu.»
Tim Pychyl fait valoir que vaincre la procrastination ne procure pas seulement plus de satisfaction immédiate, mais aussi le sentiment d’être maître de sa propre vie. «Le temps est une ressource non renouvelable, souligne-t-il. Nous ne savons pas de combien de temps nous disposons. Nous devons cesser de tourner autour du pot et nous mettre à l’ouvrage.»
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