Nous éprouvons tous de la tristesse à un moment ou un autre de notre existence. Cela fait partie de la condition humaine. Cependant, la tristesse passagère et la dépression sont deux choses complètement différentes. Heureusement, nous disposons aujourd’hui de traitements capables de révolutionner le cours de cette maladie souvent dévastatrice.
Pendant des siècles, la dépression a été considérée comme une faiblesse. Même les amis des personnes dépressives les exhortaient à se secouer. Puis, dans les années 1980, grâce aux nouvelles techniques d’imagerie, les scientifiques ont pu observer ce qui se passait dans le cerveau d’une personne dépressive. Ils ont découvert que la maladie avait beaucoup plus à voir avec la chimie du cerveau et l’hérédité qu’avec la volonté.
Lorsque vous êtes en paix avec le monde et l’existence, les neurotransmetteurs, ces messagers chimiques, circulent à toute vitesse et sans effort dans votre cerveau. Ils comblent les brèches critiques entre les milliards de neurones et favorisent la transmission des impulsions électriques et de l’information. En cas de dépression, cet échange tombe en panne; les principaux neurotransmetteurs qui régulent l’humeur ‘ sérotonine, norépinéphrine et dopamine ‘ se trouvent en déséquilibre. Les neurones ont alors du mal à conduire les impulsions.
La dépression peut prendre de nombreuses formes et ses causes sont complexes. Chez certains, c’est la chimie du cerveau qui est en cause. Chez d’autres, il suffit d’un seul événement traumatisant pour déclencher la spirale descendante. Cependant, la plupart du temps, la dépression résulte d’un mélange complexe de déséquilibres chimiques et de facteurs externes. En général, elle est diagnostiquée à l’issue de deux semaines consécutives de tristesse, d’insomnie, d’inappétence, de difficultés de concentration ou d’un soudain désintérêt pour les activités qui apportent normalement du plaisir. Les formes les plus graves peuvent provoquer une détresse aiguë et être débilitantes. Les symptômes durent souvent des mois, quand ce n’est pas des années.
Vous courrez plus de risques de souffrir de dépression si vous:
Les manifestations de la dépression varient d’une personne à l’autre. Vous devrez peut-être avoir recours à diverses approches thérapeutiques pour trouver le traitement qui vous convient. Pour la dépression légère, la première étape consiste habituellement à prendre des médicaments ou à suivre une psychothérapie (ou à jumeler les deux). Les antidépresseurs récemment mis au point (particulièrement les ISRS), qui corrigent les déséquilibres chimiques, ont changé la vie de bien des personnes. Ils agissent en une semaine, mais ne produisent généralement leur plein effet qu’au bout de quelques semaines. Si celui que vous prenez n’agit pas, votre médecin pourrait vous en prescrire un autre ou un antidépresseur appartenant à une autre famille. Ces médicaments ne créant pas de dépendance, vous pouvez les prendre sur le long terme.
Quant à la psychothérapie, elle est souvent aussi efficace que les médicaments pour traiter les symptômes de certaines formes de dépression légère ou modérée. Cependant, vos augmenterez nettement vos chances de vous rétablir et même de guérir complètement en jumelant médication et psychothérapie. Si vous optez pour la psychothérapie en premier lieu mais n’allez pas mieux au bout de six semaines et vous sentez à peine un peu mieux au bout de douze semaines, il serait avisé de prendre un antidépresseur. En réalité, il est souvent préférable de prendre un antidépresseur au départ, même pour soigner une dépression grave et débilitante. Si cela ne fonctionne pas, la solution suivante pourrait être le traitement par ECT (électrochoc).
Parallèlement aux traitements médicaux, vous devriez mettre au point des stratégies qui vous aideront à faire face à votre problème, par exemple en apprenant à communiquer ouvertement avec votre médecin ou votre thérapeute, en faisant régulièrement de l’exercice et en mangeant sainement. Tôt ou tard, vous finirez par trouver une approche équilibrée qui vous permettra d’aller mieux et vous aidera à gérer votre dépression. Il est important que vous fassiez ce qu’il faut pour trouver la formule qui vous convient car si votre dépression n’est pas entièrement guérie au bout de la première phase intensive de traitement, votre risque de rechute est élevé. Demandez l’aide de vos proches; les personnes qui se soucient de vous auront à cur de vous aider à trouver le plus rapidement possible le chemin de la guérison.
Avant de vous prescrire un antidépresseur en particulier, le médecin considérera plusieurs facteurs, notamment si vous souffrez d’une autre maladie, si vous prenez des médicaments, si votre dépression est légère ou grave, courte ou à long terme, et si elle s’accompagne d’épisodes psychotiques. Cette décision est beaucoup plus complexe qu’il ne paraît à première vue. Si votre dépression est grave, il se peut qu’il vous réfère à un spécialiste, probablement un psychiatre connaissant parfaitement bien le mode d’action, les bienfaits et les effets secondaires des dizaines d’antidépresseurs qui existent de nos jours.
Pour la dépression légère, on commence habituellement par un inhibiteur sélectif du recaptage de la sérotonine (ISRS), notamment le Prozac, le Luvox, le Paxil ou le Zoloft. Ces médicaments présentent relativement peu de risques pour les personnes qui souffrent d’une autre maladie, même de nature psychiatrique, par exemple le trouble obsessionnel-compulsif, le trouble panique, la phobie sociale ou la boulimie. De fait, les ISRS permettent généralement une meilleure prise en charge de ces diverses affections. Ils sont moins susceptibles que les antidépresseurs classiques de provoquer les réactions désagréables qui pourraient vous pousser à arrêter le traitement. Leurs effets indésirables (légère nausée, céphalée, diarrhée) semblent s’atténuer à mesure que l’organisme s’y adapte. La perte du désir sexuel constitue, pour certains, leur principal inconvénient.
Autrefois considérés comme les médicaments de choix, les antidépresseurs hétérocycliques (ou tricycliques) ont toujours leur place dans la panoplie de médicaments contre la dépression; les plus connus sont l’Elavil, le Tofranil et le Pamelor. Ils présentent l’avantage d’avoir été largement éprouvés et d’offrir un soulagement bien réel de la dépression. Les psychiatres qui les prescrivent savent ce qu’on peut en attendre. Par contre, leurs effets indésirables (somnolence, sécheresse de la bouche, vision floue, gain de poids) les ont relégués à la seconde place. Cependant, dans les cas où la dépression est accompagnée d’insomnie, les médecins tirent parti de la somnolence qu’ils causent et prescrivent une faible dose d’un hétérocyclique au coucher.
Chacun des cinq nouveaux antidépresseurs possède un mécanisme d’action spécifique, et aucun n’appartient aux classes de médicaments qui les ont précédés. On ne sait pas exactement comment agit le bupropione (Wellbutrin) mais il semble affecter la sérotonine de même que la dopamine, un autre neurotransmetteur. (Un de ses effets secondaires est de dégoûter les fumeurs du tabac; il est vendu à cette fin sous le nom de marque Zyban.). La venlafaxine (Effexor), le néfazodone (Serzone), le trazodone (Desyrel) et la mirtazapine (Remeron) exercent également cette double action sur les neurotransmetteurs, modifiant les taux de sérotonine et de norépinéphrine du cerveau. Si la sérotonine est plus touchée que la norépinéphrine, par exemple sous l’effet du Serzone et du Desyrel, on obtient un effet sédatif. À l’inverse, l’Effexor et le Remeron sont plutôt stimulants, ce qui peut nuire au sommeil. Le médecin qui décidera de ce qui est préférable dans votre cas doit forcément connaître parfaitement ces médicaments.
Enfin, au cours des dernières décennies, d’innombrables personnes souffrant de dépression ont été soulagées par les inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO), tels que le Nardil, le Marplan et le Parnate. Ces médicaments sont prescrits par des psychiatres possédant une très grande expertise : ils savent à qui ils peuvent être utiles et connaissent très bien leur mécanisme d’action ainsi que leurs effets indésirables. Ils ont aussi un bonne connaissance de leurs interactions avec d’autres antidépresseurs, avec les vasoconstricteurs et les décongestionnants ainsi qu’avec les aliments riches en tyramine, notamment le chocolat noir, les fromages vieillis et certains vins rouges. C’est essentiel, toutes ces interactions risquant d’entraîner des problèmes.
Si l’antidépresseur qu’on vous a prescrit n’améliore pas votre état, votre médecin pourrait vous prescrire, parallèlement, un stabilisateur de l’humeur, par exemple du lithium ou l’hormone thyroïdienne. Dans bien des cas, cela change tout.
Nagez, faites du vélo, marchez. Faites régulièrement de l’exercice. Vous en éprouverez du mieux-être, en partie parce que vous prenez votre vie en mains, en partie parce que l’exercice stimule la production d’endorphines, qui exercent une action analgésique et agissent positivement sur l’humeur. Les résultats d’innombrables études confirment les effets positifs de l’exercice sur les émotions : le stress et l’anxiété tombent, le sang circule mieux, la tension artérielle baisse, les émotions et sentiments négatifs ‘ impuissance, anxiété, hostilité ‘ perdent de leur intensité. Même une marche de 15 minutes peut agir positivement sur votre humeur. Lors d’une étude de petite envergure menée à l’université John Hopkins, on a découvert que les adultes qui étaient plus en forme et plus minces étaient plus susceptibles d’être heureux que les autres. Cependant, les bienfaits ne durent que tant que vous continuez à bouger.
L’exercice améliore également le sommeil, un autre facteur qui joue positivement sur l’humeur. Il est, en effet, essentiel de dormir suffisamment, idéalement sept ou huit heures par nuit. Ne faites pas de sieste dans la journée et levez-vous tous les jours à la même heure. Enfin, mangez sainement. Une mauvaise alimentation peut aggraver votre fatigue et votre sentiment de malaise.
Vous pourriez également en profiter pour explorer votre vie spirituelle, qu’il s’agisse d’une religion ou d’autres croyances, afin de trouver des réponses à votre questionnement sur le sens de l’existence. La méditation et le yoga, qui ne présentent pas de risques, pourraient vous aider à prendre du recul par rapport à vos problèmes quotidiens.
Maintenez des liens sociaux. Adoptez un animal de compagnie, prenez des cours ou inscrivez-vous à un club dont les activités vous intéressent (bridge, échecs, jardinage, marche, etc.). Si l’alcool ou les drogues semblent exercer sur vous un certain attrait, demandez à votre médecin de vous orienter vers un groupe d’entraide qui pourrait vous aider à diminuer votre consommation. L’alcool et les drogues risquent de déclencher la dépression ou de l’intensifier.
C’est une bonne idée de commencer par une psychothérapie, surtout si votre dépression est légère. Les échanges verbaux et non verbaux qui se passent entre le psychothérapeute et son patient sont parfois aussi efficaces que les médicaments. D’autant plus que les effets indésirables d’une telle approche sont inexistants et que vous n’aurez pas à craindre une quelconque interaction avec d’autres médicaments (c’est particulièrement important pour les personnes âgées, qui prennent souvent un cocktail impressionnant de pilules). Cependant, la psychothérapie ne peut soigner à elle seule une dépression grave, le processus de guérison étant plus long (il faut compter six semaines et plus alors qu’avec les médicaments, les résultats se manifestent au bout de quatre à six semaines). De plus, la psychothérapie coûte parfois assez cher.
Les thérapeutes expérimentés se limitent rarement à une seule approche; ils tiennent compte du vécu de leurs patients pour leur en proposer quelques-unes qui sauront répondre à leur situation particulière. La psychodynamique, par exemple, jette une lumière sur le passé afin de permettre de comprendre les sentiments et émotions qui nous habitent. La thérapie interpersonnelle, ou intervention de crise, est particulièrement efficace pour régler les situations ponctuelles qui nous dépriment, par exemple un enfant qui quitte la maison ou un époux qui décède.
Quant à la thérapie comportementale, elle vise à modifier les pensées ou gestes destructeurs en affinant les aptitudes sociales, la maîtrise de soi et les stratégies de résolution de problème. Elle est plus efficace lorsque le problème peut être clairement identifié et que le «bon comportement» peut être récompensé. On la jumelle souvent avec la thérapie cognitive qui, en soulignant les capacités plutôt que les inaptitudes, permet d’augmenter la confiance en soi et de contrer la peur de l’échec. Enfin, dans la thérapie de groupe, on vous offre la possibilité de partager vos sentiments, et vos solutions, avec les autres.
Si votre dépression est grave et que la psychothérapie jumelée à la médication n’a rien donné, votre médecin pourrait vous recommander un traitement par électrochocs (ECT). Les chocs ont pour effet de rétablir l’équilibre chimique du cerveau. Ce pourrait être une solution si vous perdez contact avec la réalité (psychose) ou si vous envisagez sérieusement le suicide.
Les experts ne savent pas exactement pourquoi l’ECT agit contre la dépression. Ce traitement consiste à placer des électrodes sur la tête et à faire passer un courrant électrique à travers le cerveau, ce qui provoque une crise convulsive très courte. Il se pratique sous anesthésie générale afin de prévenir la douleur résultant des contractions musculaires. Dans la plupart des cas, on traite les patients un jour sur deux pour un total de cinq à sept séances. Le traitement peut entraîner de la céphalée et des pertes de mémoire mais il s’agit presque toujours de réactions temporaires. Malgré l’image de barbarisme qui lui est accolée, l’ECT est une technique plutôt sûre; lors d’une étude, on a observé que les traitements avaient soulagé les symptômes chez 80% des patients souffrant de dépression grave.
Voici quelques conseils qui vous aideront à mieux prendre en charge votre dépression :