Une exposition sur la cryptographie se déroulera au Mundaneum de Mons jusqu'au 20 mai. Un rapport.
José de Bronckhorst, baron van Gronsfeld, était un diplomate belge qui s'occupait également de cryptographie. Le numéro de Gronsfeld porte son nom. Il date de 1734. Cette méthode de chiffrement des messages est essentiellement un chiffrement de César, mais rendu un peu plus difficile :dans un chiffrement de César, chaque lettre du message à chiffrer est remplacée par la lettre d'un nombre fixe de places plus loin dans l'alphabet, par exemple :A devient E, B devient F, C devient G. Le chiffre de Vigenère (de 1553) en est une variante améliorée :
Cela inclut un mot-clé qui est placé sous les lettres du message à chiffrer. Si le mot-clé est plus court que le message, alors le mot-clé est simplement répété un certain nombre de fois. Chacune des lettres du mot-clé correspond à un chiffre de César.
Le réglage effectué par notre compatriote est le suivant :à la place d'un mot-clé, on utilise un chiffre clé qui se répète. Chaque chiffre de ce nombre indique de combien de places dans l'alphabet la lettre à chiffrer est décalée.
La figure de Gronsfeld est utilisée, par exemple, dans un livre moins connu de Jules Verne, de la série Wonderreizen, publié en 1881. La traduction néerlandaise est intitulée :Eene raftreis. Huit cents miles sur l'Amazone :
Déjà sur la première page un message codé apparaît :
Et le texte continue ainsi :
L'homme qui incluait à la main le document, dont ce bizarre assembly de lettres formait le dernier alinea, resta quelques instants pensif, après l'avoir pensé relu.
Le document comprenait une quintaine de ces lignes, qui n'étaient pas meme divisés par mots. Il semblait avoir été écrit depuis des années, et, sur la feuille d'épais papier que couvraient ces hiéroglyphes, le temps avait déjà mis sa patine jaunâtre. Seul, cet homme et pu le dire. En effet, il en est de ces langages chiffrés comme des serrures des coffres-forts modernes :ils se défendent de la même façon. Les combinaisons qu'ils présentent se comptent par milliards, et la vie d'un calculateur ne suffirait pas à les énoncer. Il faut le "mot" pour ouvrir le coffre de sûreté; il faut le "chiffre" pour lire un cryptogramme de ce genre. Aussi, on le verra, celui-ci devait résister aux tentatives les plus ingénieuses, et cela, dans des circonstances de la plus haute gravité.
Vous pouvez retrouver les parties du livre traitant du déchiffrement du code ici.
Pendant 300 ans, le chiffre de Vigenère était considéré comme incassable. Mais vers 1850, il fut squatté par Charles Babbage et par Friedrich Kasiski, indépendamment l'un de l'autre. C'était aussi la fin de la figure de Gronsfeld. Jules Verne n'en était apparemment pas conscient, car le livre fonctionne différemment.
Une exposition sur l'histoire de la cryptographie est présentée au Mundaneum de Mons jusqu'au 20 mai. José de Bronckhorst est l'une des nombreuses personnalités que l'on y rencontre. C'est une exposition magnifiquement illustrée dans un cadre très agréable :le Mundaneum abrite l'Encyclopédie Universalis Mundaneum, une initiative de Paul Otlet et Henri La Fontaine. Il se compose d'une énorme collection de jetons. Elle avait l'ambition de rassembler toutes les connaissances du monde entier, sous toutes leurs formes (livres, écrits, iconographie, journaux, revues, etc.) et de les transformer en un Répertoire Bibliographique Universel. Conseillé! Vous trouverez ici quelques images plus atmosphériques.