De combien de sommeil a-t-on vraiment besoin? Lisez ce qui suit pour savoir ce qu’en pense une spécialiste de la question.
Concilier famille et carrière ne laisse pas nécessairement beaucoup de temps pour dormir. On essaie bien de prendre ses huit heures de sommeil chaque nuit, comme le recommandent habituellement les experts mais, en réalité, en avons-nous besoin d’autant? Après tout, certaines personnes semblent très bien fonctionner avec aussi peu que cinq ou six heures de sommeil par nuit. Nous avons demandé à Helen Driver, chercheure ontarienne spécialisée dans le sommeil et présidente de la Société canadienne du sommeil, de nous dire ce qu’elle en pense.
L’idée qu’on aurait besoin de huit heures de sommeil vient en d’études au cours desquelles on a demandé aux gens combien de temps ils passaient normalement à dormir.
Ainsi, dans une enquête menée par des chercheurs de l’université Queen de Kingston (Ontario), on a demandé à plus de 17 000 étudiants venant de 24 pays différents combien de temps ils dormaient; 63% ont répondu qu’ils dormaient entre sept et huit heures.
«Huit heures, c’est la norme pour la plupart des gens, explique Helen Driver. Au niveau individuel, c’est la quantité de sommeil dont vous avez besoin pour vous réveiller fraîche et dispose et passer à travers votre journée sans être gagnée par la somnolence.»
La quantité de sommeil qu’on prend est également influencée par la société. Les Nord-Américains d’aujourd’hui sont ce que les chercheurs appellent des dormeurs monophasiques, c’est-à-dire qu’ils ne se couchent et ne se lèvent qu’une fois par période de 24 heures et dorment durant les heures les plus obscures de cette période. Mais il n’en a pas toujours été ainsi, fait remarquer la chercheure.
«Quand on se chauffait au bois, on allait au lit à la tombée de la nuit, on dormait quelques heures puis on se levait pour mettre une bûche dans le poêle avant de retourner au lit», explique-t-elle. L’électricité a changé les choses, et nos habitudes de sommeil ont évolué. Il faut bien reconnaître que ce qui est considéré comme un nombre normal d’heures de sommeil est dicté par la culture.
«Au cours des deux dernières décennies, nos heures de sommeil ont diminué, souligne Helen Driver. Auparavant, les gens dormaient presque neuf heures. Certains pensent d’ailleurs que le manque de sommeil est une caractéristique de notre société. Pour ma part, je prévois que cette tendance va se poursuivre au cours des prochaines années et que les gens vont passer encore moins de temps à dormir.»
Selon nos observations, poursuit la chercheure, le temps que nous passons à dormir semble déterminé par nos gènes. Au cours d’une étude menée récemment par un groupe de chercheurs de l’université de la Californie à San Francisco, on a découvert qu’une mère et sa fille étaient toutes deux porteuses d’un gène rare, ayant subi une mutation, qui leur permettait de se sentir fraîches et disposes au bout de six heures de sommeil. Lorsque les chercheurs on reproduit le gène chez des souris de laboratoire, ils ont découvert que les rongeurs se réveillaient plus tôt et étaient bien reposés au réveil. «C’est la première fois que des chercheurs arrivent à établir un lien entre le bagage génétique et la durée du sommeil», commente Helen Driver. Cette découverte pourrait permettre, dans l’avenir, de traiter les gens souffrant de troubles chroniques du sommeil.
Si vous êtes bien reposée le matin même en dormant moins de huit heures, vous n’avez pas à vous inquiéter, assure la chercheure, qui ajoute que ce pourrait être suffisant dans votre cas. «Certaines personnes tirent meilleur parti que d’autres de leur sommeil et, par conséquent, ont moins besoin de dormir. On essaie toujours de faire comme tout le monde mais, en réalité, si vous dormez quatre ou cinq heures par nuit et arrivez à bien fonctionner tout au long de la journée, vous n’avez pas de problème. Pourquoi s’obliger à dormir plus que ne l’exige sa propre constitution? »
Si vous avez le sentiment d’être constamment épuisée et n’arrivez pas à fonctionner durant la journée, c’est signe que vous manquez de sommeil. Il est normal, selon Helen Driver, de traverser des périodes où le sommeil est perturbé, par exemple quand on a un nouveau-né dans la maison. Le manque de sommeil à court terme, par exemple, sur une période d’un ou deux mois, n’a pas de quoi inquiéter. «Nous sommes ainsi faits que nous pouvons rattraper le sommeil perdu.» Cependant, si cela dure pendant des années, votre santé pourrait être menacée.
«À long terme, la privation de sommeil peut avoir un impact sur la fonction immunitaire et sur le risque de maladie cardiovasculaire», prévient la chercheure. Selon les résultats d’études, il se pourrait également qu’elle mène au gain de poids et qu’elle augmente le risque de souffrir du diabète de type 2.
Si vous manquez de sommeil de façon chronique, Helen Driver conseille de consulter afin de revoir vos habitudes. «La thérapie cognitivo-comportementale cible les croyances des gens sur le sommeil et leur enseigne à adopter de bonnes habitudes», rappelle-t-elle.
Si vous préférez essayer de vous en sortir par vous-même, lisez les suggestions que nous vous proposons pour y parvenir.