Lorsque le mari de Lyne Gauthier a reçu un diagnostic de la maladie d’Alzheimer à l’âge de 63 ans, elle n’était pas du tout préparée à tenir ce rôle. Voici ce qu’elle a appris en cours de route.
«Les gens pensent que l’Alzheimer est une maladie de personnes âgées», déclare Lyne Gauthier, une professionnelle en ressources humaines qui habite au Québec. «La maladie demeure encore un grand mystère pour le public et provoque un grand malaise.» Il en allait sans doute de même pour Lyne jusqu’à ce que son mari, Yves, reçoive un diagnostic d’Alzheimer à l’âge de 63 ans. Depuis, elle s’est acclimatée à la vie quotidienne avec cette maladie étant donné son rôle d’aidante.
Société Alzheimer«L’incompréhension et la peur de l’Alzheimer créent de la gêne et de la tristesse chez les gens, ce qui les amène à se concentrer sur leur propre souffrance, explique-t-elle. Ils ont alors tendance à s’éloigner de nous et à nous oublier. On se sent isolé, ce qui aggrave la situation. On a l’impression de vivre dans un monde où l’on est exclu. »
Lyne veut mettre fin à la stigmatisation entourant la maladie. «Cessons de murmurer le mot Alzheimer parce qu’il nous effraie ou que nous en avons honte, souligne-t-elle. En sortant de notre zone de confort et en parlant de la maladie haut et fort, nous pouvons passer de la parole aux actes.»
Elle n’a pas toujours été aussi engagée. «Rien ne m’a préparée à devenir une aidante», affirme Lyne. Avant qu’Yves reçoive son diagnostic, il travaillait dans le secteur de l’audiovisuel et était un passionné de course à pied. «Il avait plus d’énergie que nos trois petits-enfants réunis!», ajoute-t-elle. Toutefois, après une chute de près de quatre mètres en 2017, il a été admis dans un centre de traumatologie, puis dans un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). Il n’avait que 63 ans.
«Après m’être renseignée auprès de la Société Alzheimer, je me suis rendu compte que mon mari présentait des symptômes de trouble cognitif bien avant 2017, déclare-t-elle. La maladie d’Alzheimer a entraîné une diminution progressive de sa capacité de penser et d’agir. D’après moi, sa motricité et son jugement étaient déjà altérés, ce qui a contribué à son accident. À cette époque, nous n’étions pas en mesure de reconnaître les symptômes.»
Depuis qu’Yves réside de façon permanente dans un CHSLD, Lyne a compris qu’il a besoin de beaucoup de soutien – surtout en tant que personne relativement jeune et atteinte de la maladie d’Alzheimer. «Aujourd’hui, Yves est capable de marcher, de parler et de lire, souligne Lyne. Nous le gardons occupé pour qu’il se sente intégré à son nouveau milieu de vie, tout en gérant son anxiété.» La musicothérapie est bénéfique car elle diminue son agitation et l’aide à s’exprimer. Le temps qu’il passe avec ses enfants et ses petits-enfants au CHSLD contribue à réduire son anxiété. «La formation continue de l’équipe de soins permet de répondre aux besoins changeants de mon mari et d’améliorer son quotidien.»
Si vous êtes vous-même un aidant ou si l’un de vos proches a reçu un diagnostic de la maladie d’Alzheimer, vous devez savoir que votre relation ne sera plus la même. Cependant, il est encore possible de conserver un lien qui a du sens. Voici quelques conseils de la part de Lyne qui vous aideront à vous adapter à votre nouvelle vie, à maintenir la communication et à faire preuve de compassion.
Rejetez les idées préconçues. «Ce n’est pas parce qu’une personne reçoit un diagnostic d’Alzheimer qu’elle est obligée de s’asseoir et de regarder un mur blanc», soutient Lyne. Bien au contraire. Les activités quotidiennes et les relations sociales deviennent encore plus importantes. «Il faut redonner un sens à sa vie. Il y a encore un être humain qui réagit, qui désire contribuer à sa communauté et conserver son indépendance.»
Parlez moins vite. Vous devez vous exprimer plus lentement lorsque vous bavardez avec la personne atteinte. N’oubliez pas qu’une bonne partie de la communication se réduira peu à peu à des gestes et à des émotions.
Renseignez-vous le plus possible. Les gens qui vivent avec une forme de démence, incluant la maladie d’Alzheimer, ont de grands besoins. «En savoir le plus possible sur la maladie permet d’atténuer notre peur, d’apprivoiser l’inconnu, de se donner la force et les moyens d’y faire face tout en ayant un regain d’espoir», explique Lyne.
Prenez soin de vous. Le rôle d’aidant est très éprouvant sur les plans physique, émotionnel et financier. Comme il peut mener à l’isolement, n’oubliez pas vos propres besoins.
Trouvez un groupe de soutien. Communiquez avec le bureau de la Société Alzheimer de votre région et joignez-vous à un groupe de soutien où vous pourrez parler de ce que vous vivez. Vous vous sentirez moins seul.
Vivez le moment présent. Cessez de penser constamment à ce qui a été perdu. Concentrez-vous plutôt sur les capacités actuelles de l’être cher et profitez des petits moments de bonheur. «Yves et moi vivons avec authenticité, ce qui est déjà remarquable», affirme Lyne.
Et à tous les autres: renseignez-vous, faites du bénévolat dans un centre de soins de longue durée (surtout les hommes car ils sont très rares parmi les personnes de compagnie) et préparez-vous à engager des conversations difficiles.
La maladie en elle-même est affligeante, angoissante et accablante par moment, mais comme Lyne le constate, elle est aussi parsemée d’élans d’amour. «On me demande souvent si mon mari me reconnaît ou s’il se souvient de mon nom. Ça n’a pas d’importance parce que je sais qu’il apprécie les moments que nous passons ensemble. Avec toi, tout est magnifique, me dit-il. Les émotions demeurent, le cœur a de la mémoire.»
Janvier est le mois de la sensibilisation à la maladie d’Alzheimer, mais il y a beaucoup de gens qui vivent avec d’autres formes de maladies cognitives comme la démence à corps de Lewy, la démence vasculaire, la démence frontotemporale et la démence mixte. Les personnes atteintes (et leurs proches aidants) méritent de la compassion et de la compréhension. Pour lire leur histoire, rendez-vous à jevisaveclalzheimer.ca.