Grâce à une technique très sensible utilisant de la lumière laser et des jets de gaz, les scientifiques sont pour la première fois en mesure de mieux comprendre la structure atomique et nucléaire des éléments les plus lourds de la table de Mendeleïev.
Les chercheurs parviennent toujours à élargir le tableau de Mendeleïev :en 2016, quatre autres éléments ont été ajoutés. Ce sont des éléments lourds qui n'existent pas sur Terre et qui sont créés avec de puissants accélérateurs de particules. «Cela se produit généralement en quantités infimes – parfois seulement quelques atomes par an», expliquent les physiciens nucléaires Mark Huyse et Piet Van Duppen. «Parce que ces atomes sont également radioactifs, ils se désintègrent rapidement:certains n'existent que pendant une fraction de seconde. D'où les connaissances scientifiques extrêmement limitées sur ces éléments.
Les physiciens espèrent changer cela avec une nouvelle application de la technique d'ionisation laser. «Nous piégeons d'abord les rares atomes lourds dans un gaz où nous les faisons briller avec une lumière laser. Cela amène l'électron le plus externe sur une orbite différente. Un deuxième faisceau laser éloigne ensuite l'électron. L'atome est ionisé :il acquiert une charge électrique positive et devient facilement manipulable et détectable. Nous pouvons déduire de la couleur de la lumière laser la quantité d'énergie nécessaire pour faire un saut d'électron :cette information est, pour ainsi dire, une empreinte digitale de la structure de l'atome de cet élément et de son noyau.'
Dans une série d'expériences, de l'actinium (Ac) a été produit dans l'accélérateur de particules de Louvain-la-Neuve. Les atomes à courte durée de vie de cet élément peuvent être créés en tirant des projectiles au néon sur un mince film d'or. Les noyaux d'actinium sont placés dans une chambre à gaz d'argon, aspirés dans un jet supersonique puis illuminés par une lumière laser pour ioniser les atomes.
L'ionisation laser est une technique bien connue en soi, mais son utilisation dans un jet supersonique est nouvelle et parfaitement adaptée aux éléments lourds et radioactifs :« En ionisant l'atome, on obtient une sensibilité beaucoup plus grande. La production de quelques atomes par seconde est déjà suffisante pour démarrer une mesure pendant les expériences. Cette technologie améliore la sensibilité, la précision et la vitesse de l'ionisation laser d'au moins un facteur dix.'
«Cela marque une ère complètement nouvelle pour la recherche des éléments les plus lourds et permet de tester et de corriger les modèles théoriques en physique nucléaire et en physique atomique. Notre méthode sera utilisée dans le nouvel accélérateur de particules du GANIL, actuellement en construction en France.'
